Avec l’âge, gérer son patrimoine seul peut devenir de plus en plus difficile. La personne âgée risque de faire des erreurs de jugement, d’oublier de régler différentes questions administratives ou de se faire escroquer par des personnes sans scrupules. La loi offre actuellement plusieurs possibilités de protéger et de gérer le patrimoine d’un senior, qu’il s’agisse du conjoint, d’un parent ou de tout autre proche. Si la personne âgée elle-même souhaite anticiper son avenir, elle peut donner une procuration bancaire à un proche ou conclure un mandat de protection future pour choisir la personne qui assurera la protection de son patrimoine en cas de perte d’autonomie. Lorsque le conjoint a des difficultés à gérer seul son patrimoine, il est possible de demander à un juge une habilitation pour prendre des décisions en son nom. Pour protéger les autres proches, une mesure de protection juridique des majeurs pourra être mise en place par un juge des tutelles.
Lorsqu’une personne âgée a des difficultés à se déplacer et à se rendre à la banque, elle peut remettre une procuration bancaire à toute personne en qui elle a confiance (enfants ou autres parents et proches) (Code civil, art. 1984 et suivants). La procuration permet à la personne désignée par le titulaire d’un compte en banque d’effectuer diverses opérations bancaires en son nom et pour son compte. Le mandataire ne pourra exercer que les pouvoirs que la personne âgée lui confèrera à travers la procuration bancaire : émettre des chèques, retirer ou déposer des espèces, faire des virements, souscrire, modifier ou résilier des produits et services financiers, et même passer des ordres de bourse.
Le mandataire doté d’une procuration doit effectuer les opérations bancaires lui-même. S’il veut déléguer une partie des pouvoirs qui lui sont conférés, la personne âgée doit donner une procuration aux autres personnes qui seront amenées à agir sur son compte. La personne titulaire du compte en banque reste responsable de toutes les opérations effectuées, même par son mandataire.
Toute personne âgée ne faisant pas l’objet d’une tutelle peut confier un mandat de protection future à la ou les personne(s) de son choix pour assurer la protection de son patrimoine (et de sa personne) lorsque ne sera plus en mesure de le faire seule (Code civil, art. 477 et suivants). La personne à laquelle le mandat est confié (mandataire) pourra ainsi protéger les biens du mandant qui en détermine la liste et les actes qui peuvent être accomplis.
Lorsque le mandat est établi sous seing privé, le mandataire a seulement le droit d’effectuer des actes d’administration, c’est-à-dire nécessaires à la gestion du patrimoine. Si le mandat est notarié, c’est-à-dire établi par acte authentique, le mandataire peut également effectuer des actes de disposition des biens (engageant la composition du patrimoine). Le mandat sous seing privé s’établit selon un modèle (Cerfa 13592-025) ou doit être contresigné par un avocat. Il pourra être enregistré auprès de la Recette des Impôts pour prévenir tout litige sur sa date. Le mandat notarié est rédigé par un notaire qui sera également chargé d’en contrôler l’exécution.
Le mandat prend effet lorsque la personne âgée n’est plus en mesure de pourvoir seule à ses intérêts et notamment de gérer son patrimoine. Le mandataire doit faire établir un certificat médical témoignant de l’altération des facultés du mandant (coût : 160 €) et faire viser le mandat par le greffe du tribunal d’instance.
Lorsqu’un senior n’est plus en mesure d’effectuer les opérations nécessaires à la gestion de son patrimoine, son conjoint peut demander au juge des tutelles à être habilité à agir en son nom pour effectuer les actes nécessaires à la protection de son patrimoine (Code civil, art. 219 et suivants). Le juge des tutelles décidera quels sont les actes que le conjoint pourra effectuer au nom de la personne âgée (location ou vente d’un bien, gestion de ses placements financiers…). Cette habilitation peut être accordée même si la personne âgée bénéficie d’une mesure de protection juridique. En revanche, une personne ne peut être habilitée à agir au nom de son conjoint si elle est elle-même sous tutelle. La demande d’habilitation doit être faite auprès du tribunal d’instance par courrier présentant la situation et éventuellement un certificat médical, si l’empêchement est d’ordre médical.
« Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique » (Code civil, art. 425). Il existe trois mesures juridiques permettant de protéger les biens et la personne d’un majeur dans cette situation : la sauvegarde de justice, la curatelle et la tutelle.
La sauvegarde de justice est une mesure temporaire, permettant d’annuler rétroactivement des actes relatifs au patrimoine du senior et allant à l’encontre de ses intérêts. La personne protégée conserve l’exercice de ses droits personnels, civiques et de gestion de son patrimoine.
La curatelle est une mesure de protection plus complète et plus longue (de 5 ans, renouvelable). Elle protège les personnes qui peuvent encore agir elles-mêmes, mais ont besoin d’être assistées ou contrôlées de manière continue dans les actes de la vie civile et les décisions relatives à la gestion de leur patrimoine.
La tutelle est la mesure de protection la plus complète. Elle concerne les personnes qui ont besoin d’être représentées de manière continue dans tous les actes de la vie civile. Un tuteur prendra seul toutes les décisions relatives au patrimoine de la personne protégée (gestion des revenus, règlement des dépenses, location d’un bien…). Il devra cependant demander l’autorisation du juge des tutelles pour les actes modifiant la composition du patrimoine (vente d’une maison…).
Toute personne en possession de ses facultés mentales peut donner une procuration à tout moment, qu’elle réside à domicile ou séjourne en établissement, ou qu’elle soit hospitalisée. Les conditions d’émission d’une procuration sont définies par chaque banque. La procuration est gratuite et elle doit se faire par écrit, souvent en remplissant un imprimé remis par la banque. Ni la personne qui donne la procuration ni son mandataire ne doivent faire l’objet d’une interdiction d’émettre des chèques. Si la personne âgée est placée sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice avec mandat spécial, elle ne peut pas donner de procuration. Cependant, une procuration émise avant la mise sous protection juridique peut être confirmée ou annulée par le juge des tutelles. Une procuration bancaire peut être annulée à tout moment, en prévenant la banque selon les conditions du contrat lié au compte.
Les demandes de mise sous protection juridique doivent être faites auprès du juge des tutelles. Elles peuvent l’être par le senior lui-même, son conjoint (concubin ou partenaire pacsé), un parent ou un allié, une personne qui exerce déjà à son égard une mesure de protection plus légère ou le procureur de la République (d’office ou à la demande d’un tiers). La requête expliquant la situation et précisant l’identité du senior et celle du requérant, ainsi qu’un certificat médical circonstancié écrit pas un médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République devront être adressés au greffe du tribunal d’instance. Le juge procèdera à une audition du majeur (sauf si c’est impossible pour des raisons médicales). Le juge désignera ensuite le protecteur qui sera de préférence un proche de l’entourage familial. Si nécessaire, un mandataire judiciaire à la protection des majeurs pourra être nommé.
La tutelle est une mesure de protection plus complète que la curatelle. La personne âgée sous curatelle peut effectuer seule les actes conservatoires et d’administration de son patrimoine (souscrire une assurance…), tandis que le tuteur s’occupe seul de ces actes lorsque le senior est sous tutelle. Le tuteur représente en effet la personne protégée dans tous les actes nécessaires à la gestion de son patrimoine, il perçoit ses revenus et règle ses dépenses dans le cadre d’un budget défini par le juge des tutelles ou le conseil de famille. Pour les actes engageant le patrimoine, comme les actes de disposition (achat ou vente d’un bien), la personne sous curatelle doit bénéficier de l’assistance de son curateur (ce dernier doit lui expliquer la transaction et signer les actes avec le senior). En revanche, un senior sous tutelle ne peut accomplir des actes de disposition et son tuteur devra recevoir l’autorisation du conseil de famille ou du juge des tutelles pour effectuer ce genre d’opérations.
La MAJ est une mesure d’accompagnement social prononcée à la demande du procureur de la République lorsque la MASP ne suffit pas à rétablir l’autonomie de la personne dans la gestion de ses ressources.
La MASP est une mesure s’adressant aux personnes qui perçoivent des prestations sociales et dont la santé ou la sécurité sont menacées par les difficultés qu’elles ont à gérer leurs ressources. Elle permet aux services sociaux du département d’aider le majeur dans la gestion de son budget et de ses prestations sociales. Elle concerne les personnes dont les facultés mentales et corporelles ne sont pas affectées, à l’opposé des mesures de protection juridique (curatelle, tutelle).
Parfois, la curatelle simple ne suffit pas pour protéger le patrimoine du majeur, mais la tutelle n’est pas nécessaire. Le juge peut alors charger le curateur de gérer les affaires courantes du majeur à sa place : percevoir ses revenus et régler ses dépenses.
Le conseil de famille consiste en quatre à six membres de la famille d’une personne majeure protégée par une mesure de tutelle. Il est nommé par le juge des tutelles lorsque la composition du patrimoine de la personne protégée le justifie. Le conseil de famille choisit le tuteur, qui doit solliciter son accord pour accomplir des actes de gestion engageant le patrimoine du majeur.